Carte Blanche publiée dans La Libre le 19 décembre 2017

Pourquoi les Nations Unies et l’Union Européenne continuent-elles à financer les pourparlers de paix d’Arusha sans issue pour le Burundi ?

Depuis la candidature de Monsieur Pierre Nkurunziza pour un troisième mandat illégal et illégitime en avril 2015 suivi par des violences sanglantes de la part du pouvoir de CNDD-FDD et sa milice Imbonerakure, les Nations Unies, l’Union Européenne et l’Union Africaine ont sorti des Résolutions sur le Burundi mais aucune n’a été mise en application.

Les mêmes organisations internationales ont demandé et soutenu le dialogue inter-burundais sous la médiation du président ougandais Kaguta Yoweri Museveni, nommé lors du sommet des chefs d’États de la Communauté de l’Afrique de l’Est du mois de juin 2015 ; un sommet qui ne l’était que de nom. Parmi les 5 présidents attendus, seuls Museveni et son homologue tanzanien étaient présents avec les ministres des affaires étrangères qui représentaient les autres chefs d’Etat «empêchés ». Cette absence au sommet traduisait une fois de plus le désaccord de ces chefs d’État sur le 3ème mandat de Pierre Nkurunziza.

Ensuite, en date du 03/03/2016, les chefs d’Etats de la Communauté de l’Afrique de l’Est ont nommé l’ancien président tanzanien William Benjamin Mkapa comme facilitateur dans le dialogue inter-burundais.

Depuis le début des pourparlers en décembre 2015, jusqu’à ce jour, il n’y a pas eu de volonté, ni de la part du médiateur, ni de la part du facilitateur, ou même des pays de la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE), de trouver une solution durable au conflit burundais.

Le médiateur et le facilitateur avaient annoncé que les pourparlers qui viennent de se terminer à Arusha en queue de poisson vendredi dernier le 08/12/2017 seraient les derniers qui pourraient mener à un accord de paix entre les burundais.

Or, nous dénonçons ceci :

– La non inclusivité, et en particulier l’absence des femmes : condition sine qua none à la tenue et la réussite du dialogue inter-burundais.
– Une rhétorique et des discours aux antipodes des valeurs compatibles avec de vraies négociations neutres, ou bien encore la position adoptée par le médiateur face aux futures enquêtes de la CPI sur les crimes commis au Burundi.
– Une partie prenante au conflit qui détourne, à son profit, l’objet même des négociations et vide le dialogue pour la paix de tout son sens. Sachant que le seul souci du gouvernement du Burundi est d’enterrer complètement l’Accord d’Arusha de 2000 et de modifier la Constitution Burundaise afin que Nkurunziza Pierre se représente aux élections de 2020.

Malgré les lacunes précitées, l’équipe de la médiation et de la facilitation a tenu absolument à organiser ces négociations vides de sens en conviant des participants sans critères de sélection clairs et sans agenda malgré les appels lancés par les acteurs opposés au gouvernement de facto de Bujumbura depuis l’annonce de ce round de négociations.

Selon les sources sur place à Arusha, l’équipe de la médiation et de la facilitation ne savait plus sur quel pied danser face aux divergences d’opinion des différents acteurs présents, avec chacun son point de vue et son agenda, de telle manière que la petite équipe a été morcelée en 5 groupes.
La séance de clôture de ces négociations fût bâclée et chahutée, un vrai fiasco ! Au vu de tout cela, il nous semble impossible d’arriver à un consensus tel qu’on l’attendrait si l’opposition avait pu débattre avec le gouvernement burundais.

Face à ces manquements, nous demandons aux Nations Unies, à l’Union Africaine, à l’Union Européenne et à la Communauté des États de l’Afrique de l’Est :

– La suspension immédiate des actuelles négociations d’Arusha et l’arrêt du financement, par les NU et l’UE, de ce dialogue imparfait.
– La mise sur pied d’une équipe de médiation et facilitation adéquate, à même d’organiser un dialogue inclusif pour toutes les parties liées au conflit burundais, en remplacement de celle actuelle, qui, depuis 2015 a montré ses limites en matière d’organisation des négociations sérieuses.
– La mise en place d’un embargo économique sur le gouvernement du Burundi susceptible de l’amener à la table de négociations.

Les signataires :

Juliette Nijimbere, Membre fondatrice du Collectif des femmes pour la paix et la démocratie au Burundi , Représentante Légale de l’ASBL Kira-Ukize et Présidente de l’ASBL Ibirezi vy’Uburundi

Gioia Cizanye, Enseignante – Artiste

Chantal Kamatari, Membre fondatrice du Collectif des femmes pour la paix et la démocratie au Burundi et Vice-Présidente de l’ASBL Kaze

Simone Susskind, Sénatrice et Députée Bruxelloise

Hélène Ryckmans, Sénatrice, députée Wallonne et de la Fédération Wallonie – Bruxelles

Julie De Groote, Présidente du Parlement Francophone Bruxellois

Nadia El Yousfi, Sénatrice des entités fédérées et Députée Francophone Bruxelloise

Joëlle Milquet, Députée Bruxelloise

Claire Lammerant, Secrétaire Fédérale du MOC Brabant Wallon.

Magda De Meyer, Présidente du NVR (Nederlandstalige VrouwenRaad)

Lydia Maximus, Ancienne Sénatrice, spécialiste du Burundi à AWEPA

Zakia Khattabi, Co-présidente ECOLO

Elena Matundu, Présidente de l’ASBL GFAIA, Groupements des Femmes Africaines Intégrées et Actives.

Modi Ntambwe, Présidente du RVDAGE/VL-SVAV

Christine Steinbach, Présidente des Équipes Populaires

Frédérique Mies, Docteur en sciences biomédicales et pharmacologie

Jean-marc Sengier, Secrétaire Fédéral de la CSC Brabant Wallon

Christian Kunsch, Président du MOC

Evelyne Huytebroeck, Députée au Parlement Bruxellois

André Du Bus, Député au Parlement Bruxellois

Céline Delforge, Députée au Parlement Bruxellois

Kenza Yacoubi, Députée au Parlement Bruxellois

Véronique Jamoulle, Députée au Parlement Bruxellois

Isabelle Kibassa – Maliba, Députée à la Province du Brabant Wallon

Payfa Martine, Députée au Parlement Bruxellois